L'heure des retrouvailles sous le regard des Roses. [ft. Nana]

Depuis son arrivée à Ecumexy, Nanabelle allait se promener dans les champs à chaque jour, sans exception. L’effluve agréable que dégageaient les diverses fleurs lui procurait un étrange sentiment de réconfort. Aujourd’hui, elle avait les pieds nus et placés droit dans un étang peu profond, bien dissimulé derrière de gros buissons. Avec Bubblegum sur son épaule et Toast qui était assis derrière les deux individus, la jeune femme profitait de chaque instant. Avec tout ce qu’elle voulait guérir et même oublier, la flore de cette île lui faisait un grand bien. Ça l’apaisait. Ces derniers jours, elle ne s’était aucunement préoccupée de ce qui l’entourait, gardant son attention sur le nouveau parcours qu’elle avait choisi de suivre ; les “petites vacances” qu’elle avait décidé de prendre, en fait. J’en ai bien besoin, j’en suis consciente. C’est au moment où elle prit une grande respiration que son husky se mit à renifler quelque chose. Un écureuil venait de descendre d’un arbre. Aussitôt, Toast était parti en jappant. Sans plus attendre, Nana se lança à sa suite. Ni ses sifflements, ni ses mots ne semblaient atteindre les oreilles de l’animal.


— Toast, reviens ici ! Oh, bon sang… Je te nourrit bien, pourtant !


Courir sans chaussure ne dérangeait pas du tout la rousse. Se promener ainsi était devenue une habitude. Pendant leur petite course-poursuite, elle avait cru voir quelqu’un du coin de l'œil. Une personne qui était assise parmi des fleurs rouges. En s’arrêtant plus loin, elle vit que l’écureuil était monté dans un autre arbre. Le canidé grognait, visiblement frustré d’avoir raté le rongeur. Quant à Bubblegum, le caméléon semblait agacé par le fait qu’il avait dû s’accrocher à la robe noire de sa maîtresse pour ne pas tomber, alors qu’elle courait. En ramenant Toast vers elle, Nanabelle s’était mise à le caresser pour le calmer. Après, se dirigeant vers l’étang de tout à l’heure, elle repassa devant la silhouette qui se trouvait sur l’herbe. En jetant un bref coup d'œil, elle continua sa route… Ce n’est qu’après avoir réalisé que ce visage semblait si familier que la fille à la tresse se stoppa net. Quelques pas en arrière, puis elle se trouvait devant lui. Elle était bouche-bée, aucun son ne réussissant à sortir. J-je rêve ou c’est..? Après un instant, Nanabelle s’avança avec les yeux brillants, les joues rougies et le cœur palpitant.




— Bon-… Bonjour ! Fit-elle dans un élan de courage, essayant de garder un ton clair. Son excitation était visible, telle une enfant qui déballait son premier cadeau d’anniversaire. Elle n’en croyait pas ses yeux ! Votre nom ne serait-il pas “Kyo”, par hasard ? Une courte pause, puis la rouquine reprit en souriant de toutes ses dents. Je suis… Je suis Nanabelle !

J’espère sincèrement que ce n’est pas un homme qui lui ressemble…

Le contact du corps de Kyo contre le sien la fit rougir encore plus. Nanabelle croyait être en train de rêver. Ce moment qu’elle avait tant attendu semblait irréel. Son visage de la couleur d’une tomate, elle le releva jusqu’à croiser le regard de l’homme au moment où celui-ci fit de même, alors qu’il disait qu’elle lui avait manqué. Le cœur de la rouge fit un bond dans sa poitrine lorsque Kyo la complimenta. Diverses pensées se bousculaient dans son crâne. Il est vraiment là. Elle se retenait de dire quoi que ce soit, car elle savait que tout ce qui pouvait s’échapper de sa bouche allait être des bruits incompréhensibles. Elle semblait être incapable de penser clairement, à cet instant. Ensuite, Nanabelle ne fit que suivre Kyo, s’installant aux côtés de ce dernier. Après une grande respiration pour se calmer, elle prit la parole tout en gardant son grand sourire.


— Je voulais quitter Baterilla et commencer à voyager. C’est donc… Ce que j’ai fait. Commença-t-elle timidement, le regardant du coin de l'œil. Toast s’approcha du blond en le reniflant, l’air curieux et agitant la queue, tandis que Bubblegum vint se poser sur les genoux de Nana. J’avais besoin de changement. Voir la beauté des mers et de certaines îles m’ont fait un grand bien, je dois l’avouer.


En caressant doucement la tête du caméléon rose et discutant avec Kyo, la jeune femme avait l’impression de revivre la soirée inoubliable qu’elle avait passée avec lui… Avec un sentiment de liberté qui n’allait pas disparaître lorsque la nuit allait s’achever, contrairement à la dernière fois où les deux adultes s’étaient vus. La chaleur qui se propageait au fond d’elle-même à chaque fois qu’elle se remémorait leur petite escapade était devenue une sensation addictive. L’un de ses souhaits les plus chers était de ressentir cela à nouveau et donc, de recroiser le chemin du Maître Kebabier. Elle ne pouvait pas s’empêcher de vouloir ça, oubliant tous ses soucis lorsque cette chaleur s’emparait d’elle. C'était un rêve devenu réalité. En baissant ses prunelles spiralées vers la nourriture, ça lui ouvrit l’appétit. Sa bonne humeur avait également contribué. Nanabelle était prête à manger. Toast était venu s’asseoir entre elle et le cuisinier, faisant de son mieux pour ne pas se jeter dans le pique-nique. Mine de rien, il savait que sa maîtresse n’allait pas être contente s’il faisait une bêtise de ce genre. Le chien bicolore semblait avoir oublié pourquoi il avait chassé un écureuil, plus tôt. Il restait donc là, sage comme une image. Eh bien, on dirait que tu t'es calmé.




— Et vous, Kyo, vous êtes venu visiter Ecumexy ? Vendre vos délicieux plats, peut-être ? J'espère que vos voyages se sont passés sans embûches. En tout cas, je n’aurais jamais cru vous retrouver ici ! Une pause, puis elle enchaîna en prenant une tranche de pain. Vous savez… Parfois, le hasard fait bien les choses. Je suis ravie de vous revoir. Ses joues claires s’étaient rougies encore une fois. Elle transperçait le blondinet avec un regard intense, mais sans aucune malice. Je… Je l'ai longtemps voulu. Souffla-t-elle avant de croquer le pain qu'elle venait de garnir. Oh, c'est très bon !

Après avoir terminé sa première petite tartine, Nana s’était discrètement pincée le bras pour être certaine que ce n’était pas un rêve. Cette journée soi-disant normale était devenue parfaite en seulement quelques secondes… Mais le méritait-elle vraiment ? Après tout ce que la jeune femme avait fait, pourquoi avait-elle le droit de se sentir heureuse ? Pendant un instant, ses idées s’étaient brouillées et un grand sentiment de honte s’empara d’elle. Baissant son regard vers ses genoux, c’est là que Bubblegum remarqua son air et grimpa encore une fois sur l’épaule de sa maîtresse pour venir frotter son nez rosé contre sa joue. Il était monté aussi vite qu’il avait descendu, quelques secondes plus tôt. Puis, elle entendit Kyo lui demander le nom de ses deux compagnons. Esquissant un léger sourire, elle redirigea son attention sur lui.


— Tous les deux sont de bons garçons. Voici Toast, mon chien. Il est très affectueux et plutôt énergique. Fit-elle en rigolant doucement, tout en montrant de sa main les animaux. Voici Bubblegum, mon caméléon. D’ordinaire, je n’ai pas vraiment “d’affinité” avec les lézards, mais il est une exception. Bub est un petit curieux rempli d’amour et il a une attitude bien à lui.


Sa bonne humeur était aussitôt revenue. La chaleur s’était à nouveau répandue en elle. La plupart du temps, le moral de Nanabelle était comme des montagnes russes ; se baissant et se montant sans cesse, sans crier gare. Il fallait qu’elle fasse tout son possible pour garder la tête haute, non seulement pour elle-même, mais pour Toast et Bubblegum. Ils n’aimaient pas la voir ainsi, c’était plutôt évident. Justement, le jeune husky avait son regard rivé sur la jolie rousse. Après avoir compris que cette dernière allait déjà mieux, il reposa sa tête au sol, appréciant les caresses de Kyo. La réponse de celui-ci à la question de Nana la fit se sentir mal à nouveau, malgré le sourire du cuisinier. Le bout des doigts sur ses lèvres rosées, elle le regardait d’un air attristé. Je lui ai rappelé un mauvais souvenir ! Je suis horrible… La chose qui rassura la voyageuse était de savoir que le blond avait retrouvé son gamin.


— Je suis tellement désolée pour votre navire, mais je suis très heureuse d’entendre que votre fils va bien. Souffla-t-elle, soulagée. Après tout, Nanabelle adorait les enfants et rencontrer le petit Shin était quelque chose qu’elle aimerait beaucoup faire.


Elle se mit à rougir — encore une fois —  lorsque le kebabier lui dit qu’il avait lui aussi eu une forte envie de la retrouver. Se faisant également une autre tartine, elle l’écoutait avec grande attention. Elle lui renvoya son doux sourire, alors qu’il reprit la parole, lui demandant de le rejoindre dans ses aventures. Court moment de silence. Le cœur battant, la fleur rouge s’approcha rapidement de Kyo en avançant avec ses genoux. Bubblegum venait de revenir au sol, agacé par ce mouvement soudain. Malgré le fait que la tartine de Nanabelle venait de tomber par terre, ses yeux dorés brillaient. Elle prit la main libre de l’homme, entourant celle-ci avec ses propres paumes. C’était la proposition la plus géniale qu’on lui avait faite !


— Oui ! Avec grand plaisir ! Sa voix était devenue légèrement plus aiguë, car elle était toute excitée et contente. En ce moment, dans sa tête, elle se voyait en train de sautiller joyeusement d’un côté et de l’autre avec les mains sur les joues. Reprenant ensuite une attitude moins enfantine, l’écarlate s’asseya à côté de Kyo en toussotant un peu. Posant son index sur son menton, elle continua en adoptant un air interrogateur.




— Ahem… Alors, allons-nous voyager en canot ? Il n’y avait aucune méchanceté dans son ton ou dans son regard, elle ne faisait que le taquiner. Un sourire en coin se dessina sur son visage.

En entendant “noix de coco” sortir de la bouche de Kyo, la rouquine n’avait pas pu s’empêcher d’éclater de rire, comme à chaque fois que quelqu’un disait cela. Elle ne savait même pas pourquoi elle trouvait ces trois mots réunis aussi drôles, mais Nana était là en train de rigoler comme une gamine. Elle n’aimait pas son rire, cet étrange “jarara” qui s’échappait de sa gorge depuis qu’elle avait croqué dans son Fruit du Démon. Du coup, au début, elle avait tenté de s’empêcher de ricaner en posant sa main sur ses lèvres, surtout afin de ne pas se faire regarder de travers par le cuisinier. Et puis après..? Pensa-t-elle avant de rire de bon cœur sans se cacher. Il n’est pas comme ça, tout va bien ! Ce n'est pas quelqu'un de méchant.


— Jararara !! Ouf… Bon sang, pardonnez-moi. Dit Nanabelle en essuyant elle aussi une larme et avec son autre main posée sur son ventre, tentant de reprendre son souffle. C’est juste que… Vous avez dit “noix de co-”… Elle n’eut pas le temps de finir qu’elle se remit à rire, cachant son visage avec la paume de ses mains.


Ce n’est qu’après quelques secondes qu’elle se remit à écouter ce que Kyo avait à dire. Ce qu’il lui racontait venait de complètement capter son attention. Technologie antique ? La voyageuse visualisait du mieux qu’elle pouvait ce à quoi pourrait bien ressembler le projet de l’homme, tandis que ce dernier pointait le ciel. Rêveuse, ses yeux spiralés brillaient alors qu’elle fixait des nuages qui passaient. Woah..!


— Effectivement, c’est incroyable ! Vous possédez une telle créativité, c’est merveilleux ! Juste après, il continua tout en posant sa main sur la sienne. Décidément, Nanabelle adorait ces simples contacts physiques. Elle l’écoutait toujours en souriant, mais les deux jeunes gens furent vite interrompus par une certaine créature que l’ancienne fille de joie était très heureuse de revoir. La petite boule de poils qui avait contribué à la magnifique soirée qu’elle avait vécue, il y a quelques années. Oh, mais c’est..! Ses deux compagnons animaliers fixaient Kirara d’un air curieux.


Tout en se relevant en même temps que Kyo, Nana indiqua à Toast et Bubblegum de faire de même. Le caméléon s’était installé sur la tête du husky, tous les deux prêts à suivre leur maîtresse. L’écarlate déposa sa main dans celle du blondinet, encore une fois, puis se mit en route. Elle avait confiance en lui et en ses propres capacités. Si quelqu’un venait chercher à leur faire du trouble — et surtout à gâcher ce moment si précieux — l’Étouffeuse n’hésiterait pas une seconde à refaire surface… Même si elle ne voulait pas que le kebabier la voit ainsi, si tôt après leurs retrouvailles. Repoussant ses idées sombres, elle continuait à avancer avec lui, le chien trottinant à leur gauche, alerte. Ça va bien se passer. Se répétait-elle en pensée.